Les Revenants VS Hate List

Les Revenants, Laura Kasischke, Christian Bourgois

Hate List, Jennifer Brown, Albin Michel (Wiz)

Aujourd’hui je fais coup double. Je vais vous parler de deux livres en même temps pour changer. Deux grands chocs.

Je les rassemble à cause de leur univers. Les deux ont été écrits par des auteurs américains. Les deux livres parlent du malaise de la jeunesse américaine. Les styles ne sont pas du tout les mêmes. Mais ce sont de très bons livres.

Le premier a été écrit par Laura Kasischke et il s’intitule Les Revenants.

Je ne connaissais l’auteur que de nom. Tout le monde était d’accord pour me dire que c’était une des auteures qui comptait aux States. Eh bien ! Je suis à présent de cet avis. Quel livre ! L’histoire commence par le retour d’un étudiant, Craig, sur le campus de sa fac après un certain temps d’absence. L’année précédente, il a tué sa petite amie, la belle et évanescente Nicole, au cours d’un accident de la route. Vous imaginez le moral du gamin et l’ambiance sur le campus. Haï par les filles appartenant à la sororité à laquelle la défunte appartenait (vous savez les fameuses fraternités Alpha, Beta, Gamma… qu’on retrouve dans tous les films de campus. Eh bien là c’est le nom pour les filles), il tente tant bien que mal de reprendre une existence normale. Mais des choses de plus en plus bizarre vont se produire autour de lui. Pour découvrir le fin mot de l’histoire, Craig sera aidé par Perry, son meilleur ami et parfois souffre douleur. À cette intrigue principale, plusieurs autres intrigues, sans rapport en apparence, se mêlent.

Le style est très bon, la narration est très habile. Un vrai page-turner, Kasischke fait monter la pression tranquillement, mine de rien, mais on la sent bien qui s’épaissit, devient lourde et moite, elle nous colle à la peau. La description de ce milieu clôt est fascinante, c’est tellement étranger au système universitaire français. L’ambiance est étrange, à la limite du fantastique. L’incipit onirique qui décrit le fameux accident est un bon exemple de cette ambiance particulière. Le drame est raconté à la manière d’un songe cotonneux et à peine réaliste le tout baigné par la lumière pâle de la pleine lune. C’est vraiment étrange.

Ne ratez surtout pas ce très grand livre !

Le second livre, Hate list, écrit par Jennifer Brown, se passe en fin de lycée (en terminale quoi !)

Le style est très différent. Nous sommes dans la tête de l’héroïne et narratrice de l’histoire, Valérie. Son copain s’est suicidé quelques mois auparavant, après avoir commis un geste irréparable et incompréhensible. Il est l’auteur de la fusillade qui a causé la mort de plusieurs élèves et professeurs du lycée où tous les deux étaient scolarisés. C’est pas joyeux me direz-vous. C’est vrai, mais c’est pas tout. Toutes les personnes tuées figuraient sur une liste, la fameuse « Hate List », créée par Valérie. À sa décharge, elle ne pensait pas que ça irait jusque là, l’idée était juste de faire une liste des personnes qu’ils détestaient. En plus c’est elle qui a mis fin à la tuerie en s’interposant entre son petit ami et l’une des victimes, se prenant une balle au passage. Encore une fois, le retour en cours s’annonce compliqué. Personne n’ose lui parler, ses anciens amis lui tournent le dos…

J’ai beaucoup aimé le fait que l’auteur emploie un style à la première personne. Il nous fait ressentir cette histoire de l’intérieur. C’est tellement bien fait que parfois j’avais l’impression d’être Valérie, de ressentir son malaise, d’avoir les mains moites comme l’héroïne. Combien de fois je me suis surpris à hésiter à m’engager dans une phrase comme Valérie hésite à s’engager dans les couloirs de son lycée ne sachant pas qui elle allait rencontrer et ce qu’on risquait de lui faire. Ce livre nous amène à nous poser beaucoup de questions. Et si ça nous était arrivé ? Qu’aurions nous fait ? Quelles auraient été nos réactions dans pareille situation que l’on ait été les responsables ou les victimes de cette horrible histoire ? Ce livre s’adresse principalement aux jeunes adultes mais il mériterait largement un lectorat beaucoup plus grand.

Un très bon livre qui secoue.

LUI